Les données sont puissantes, mais les données rendues visibles ont le pouvoir de convaincre, d’influencer les comportements et même de sauver des vies. Ce n’est là que l’une des leçons à tirer d’un ambitieux programme d’amélioration de la qualité en Italie.
L’auteur russe Ivan Tourgueniev a écrit un jour : « Le dessin me montre en un coup d’œil ce qui pourrait s’étaler sur 10 pages dans un livre. » Napoléon Bonaparte avait précédemment exprimé la même pensée de manière plus succincte : « Un bon croquis vaut mieux qu’un long discours », aurait-il dit.
Mais puisque nous sommes en Italie, nous devrions peut-être laisser la parole à Léonard de Vinci.
Les historiens de l’art rapportent son opinion selon laquelle « un poète serait vaincu par le sommeil et la faim avant de pouvoir décrire en mots ce qu’un peintre peut dépeindre en un instant », ce qui est une manière évocatrice de dire qu’une image vaut mille mots.
L’idée selon laquelle voir quelque chose est une meilleure méthode d’apprentissage que d’écouter sa description se vérifie dans l’Italie d’aujourd’hui où les données issues de l’ambitieux projet de contrôle de la qualité MonitorISO de l’Organisation italienne des AVC ont été saisies dans un outil interactif d’analyse des données et décrites dans des graphiques qui valaient bien plus que mille mots.
Ce qui a été décrit en un instant grâce à ce logiciel souple, c’est la preuve indiscutable que le traitement des AVC aigus en salle d’examen TDM était la clé de la réduction des délais d’attente avant le traitement, et donc la clé pour atteindre les objectifs que la communauté italienne des AVC avait identifiés pour 2021, notamment les valeurs médianes du délai d’intervention après admission et du délai d’attente avant la ponction de l’aine de 30 et 90 minutes, respectivement.
Une image claire se dessine
Le professeur Danilo Toni (ci-dessus), lauréat du prix de l’esprit d’excellence de cette année, et le comité de l’Association italienne de l’AVC, sont le moteur de MonitorISO (à l’avenir MonitorISA, car l’organisme national de coordination de l’AVC utilise désormais l’acronyme ISA-AII).
MonitorISO est un programme d’amélioration de la qualité soutenu par les Angels qui exige des hôpitaux participants qu’ils enregistrent et communiquent les données relatives aux patients victimes d’AVC sur une période de 30 jours, deux fois par an.
L’observance n’a cessé de croître depuis que la première édition de MonitorISO a attiré 108 hôpitaux participants en mars 2020. En octobre 2020, ce nombre est passé
à 134, pour atteindre 142 en mai de cette année. L’objectif pour MonitorISO 4, qui débuta en novembre 2021, était de 200, ce qui représente plus de 90 % des 220 hôpitaux italiens prenant en charge les AVC.
Les résultats ont été moins impressionnants. Dans la première et la deuxième édition, le délai médian d’intervention après admission est resté à 75 minutes, soit bien plus du double de l’objectif national. Le délai d’attente avant la ponction de l’aine s’est légèrement mieux comporté, passant de 120 à 114 minutes et s’approchant de l’objectif national avec 98 minutes lors de la troisième édition.
MonitorISO 3 a également enregistré une légère baisse du délai médian d’intervention après admission qui est passé à 66 minutes. Il y a pourtant une autre raison pour laquelle cette édition pourrait s’avérer être le véritable moteur de changement que le comité directeur italien des Angels et les consultants en Italie espéraient.
Dans ce cas, les données ont été saisies pour deux actions prioritaires : la prénotification par les services médicaux d’urgence et le nombre d’hôpitaux qui se sont conformés à la campagne TAC de l’ISO qui encourage les hôpitaux à gagner du temps (et à préserver une plus grande partie du cerveau) en traitant les patients victimes d’AVC en salle d’examen TDM.
Un compte-rendu des résultats a été compilé à l’aide de Power BI, une application Microsoft capable de créer un affichage interactif des données pour des paramètres spécifiques au niveau national, provincial, régional et hospitalier. Lorsque le lieu de traitement a été mis en corrélation avec le délai d’intervention après admission, une image claire est apparue et a révélé ce qui suit : le délai médian enregistré lorsque les patients étaient traités dans l’unité neuro-vasculaire était de 76 minutes. Pour les patients traités au service des urgences, il était de 67 minutes, et pour le petit nombre de patients traités en salle d’angiographie, de 60 minutes. Les 34 hôpitaux qui ont déclaré traiter en salle d’examen TDM ont toutefois enregistré un délai médian d’intervention après admission de 49 minutes.
« Lors des éditions précédentes, nous avions présenté les comptes-rendus sous forme de diapositives PowerPoint », explique Elisa Salvati, consultante des Angels. Mais ce nouvel outil, mis en œuvre par Elisa et ses collègues Lorenzo Bazzani et Stefania Fiorillo, a produit un message graphique puissant qui montre sans aucun doute que les meilleurs résultats sont obtenus par un traitement en salle d’examen TDM.
Elisa déclare : « Cela a clairement démontré l’impact qu’avait le fait d’amener les patients directement en salle d’examen TDM et de commencer le traitement au même endroit. Cela a montré exactement pourquoi il est si important de mettre en place cette action prioritaire. »
Le vent tourne
Il a été difficile de convaincre certains hôpitaux d’appliquer le traitement en salle d’examen TDM. Dans une région où pas un seul hôpital (sur 25) n’était disposé à introduire cette action prioritaire dans son parcours de prise en charge des AVC, le vent a tourné seulement lorsqu’un médecin a tendu la main et entraîné avec lui ses collègues. Bientôt, cet hôpital enregistrait, et de loin, les meilleurs résultats. Lorsque ses résultats ont été partagés lors de réunions régionales, d’autres hôpitaux ont envisagé de suivre son exemple.
La mise en concurrence, la démonstration par l’exemple, la pression des pairs et les images jouent tous un rôle pour influencer le comportement, et bientôt ces leviers pourraient gagner encore en puissance. Currently reports are anonymised, with individual hospitals able to see only where their performance ranks against others in the region, but consent is being sought to identify hospitals in the reports, with challenges coming from a minority who would rather not be named alongside their results.
Le retour général a toutefois été positif, l’équipe de consultantes Angels (à laquelle participe désormais Alessia Santori) ciblant les hôpitaux moins performants et envoyant des invitations aux hôpitaux qui souhaitent être aidés pour optimiser leurs propres parcours de prise en charge afin de fournir de meilleures données dans MonitorISO 4.
Toujours au troisième trimestre 2021, pour coïncider avec la première édition des prix Angels pour les SMU, le programme d’amélioration de la qualité a été étendu aux services des urgences avec le lancement de MonitorICTUS pour recueillir des données sur le parcours de prise en charge préhospitalière.
Les questions s’appuient sur les critères du prix pour les SMU et englobent la prénotification, le temps passé sur les lieux, le signalement des informations concernant les traitements et le dernier état normal connu, ainsi que le pourcentage de patients acheminés vers des hôpitaux capables de prendre en charge les AVC.
Il est tout aussi important d’améliorer les normes de prise en charge préhospitalière en fournissant un retour d’expérience sur les résultats cliniques, par exemple en démontrant l’impact positif de la prénotification sur les scores NIHSS ultérieurs des patients et sur les scores de Rankin après trois mois.
Les services médicaux d’urgence en Italie ont manqué de peu d’être éligibles à la première série de prix pour les SMU, mais comme le disait un diction de l’époque médiévale, Roma uno die non est conditar. Rome ne s’est pas faite en un jour ou, comme le déclare l’équipe des Angels italiens : « Nous sommes en plein milieu du processus. Ce n’est pas encore terminé ».